Détourneur de réalité(s)

Andrea
Redavid

Textes écrits au printemps 2021 par Anaïs Heluin, pour un projet développé entre septembre 2020 et juin 2021 dans le cadre de la formation supérieure.

Biographie

Italien, né en 1981. Après l’École Nationale d’Art Dramatique du Teatro Stabile de Turin, Andrea Redavid travaille à Rome pour le cinéma et le théâtre, avec Emma Dante, Luca Ronconi, Bruce Myers… Il arrive en France en 2008, où il complète sa formation au Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique. Il découvre la magie avec Thierry Collet, et la création théâtrale basée sur l’improvisation avec Ariane Mnouchkine. Au retour d’un voyage de recherche artistique, anthropologique et personnel de 4 ans en Asie, en Australie et en Nouvelle-Zélande, Andrea prend un tournant en entrant en 2015 au Centre National des Arts du Cirque de Châlons-en-Champagne (CNAC) afin de suivre la formation en magie nouvelle de Raphaël Navarro. La magie devient son principal outil d’écriture. Il est au cœur du premier spectacle de sa compagnie Nocebo, Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur votre cerveau (2016), et de Synestesya dont il entame l’écriture en 2018 avant d’entrer à la FAI-AR.




Retour sur le projet personnel de création

Pendant l’écriture de son projet personnel de création, Andrea a été accompagné par
Jean-Baptiste Quenin-Blanche, metteur en scène et magicien (Les décatalogués).

Depuis la création de sa compagnie Nocebo en 2017, Andrea Redavid fait du « détournement du réel dans le réel » son élément d’écriture principal. Tout en acquérant à la FAI-AR les compétences administratrives qui lui manquent pour continuer de structurer son travail, le comédien expérimente la rue comme lieu de crédibilité ultime. Il y poursuit ses premières expériences de magie dans l’espace public, commencées un peu plus tôt avec Kurt Demey, passé lui aussi par la FAI-AR. Dans l’esprit de la magie nouvelle, qu’il a pu approcher auprès de Raphaël Navarro sans cesser de se considérer avant tout comme un comédien, il met la magie au service d’un propos. Dans Du Pain et des Jeux, il s’intéresse à la spectacularisation de la mort.

Interactif et immersif, conçu pour être joué sur une place publique, ce spectacle place le·la spectateur·rice dans une uchronie, dans une sorte d’univers parallèle qui ressemble étrangement au nôtre. À la différence que les exécutions publiques y sont autorisées. Elles rythment la vie de la cité, comme elles l’ont fait en plusieurs lieux et périodes passées qu’a étudiées Andrea Redavid pour construire sa pièce. Soit une installation plastique faite de stands et d’entresorts dont certains reposent sur des techniques de magie, d’autres non, et un spectacle participatif.

C’est une fiction fragmentaire qui donne à expérimenter les différents espaces d’un salon professionnel pour bourreaux-exécuteur et qui offre aux spectateur·rice·s une grande liberté de parcours et d’interprétation. En configuration frontale, le fait pénétrer dans une fiction nourrie de « grandes illusions ».* Dans l’histoire d’un frère et d’une sœur qui viennent d’hériter de l’entreprise familiale de fabrication de machines de mise à mort. La marchandisation de la mort, dans Du Pain et des Jeux, fait écho à la violence de certains tours de magie iconiques, tels «la femme coupée en deux» mais invite aussi à réfléchir sur nos modes de consommation. Portée par un métalangage, elle interroge aussi la portée politique du spectacle de la mort aujourd’hui.