Griote • Bonequeira

Ana Laura
Nascimento



Ana Laura Nascimento est conteuse et marionnettiste. Elle est arrivée dans le conte par les nuits de coupure d’électricité au nord-est brésilien. Les journées où l’électricité revenait, elle partait à l’université en Arts du spectacle/Pédagogie du théâtre à Recife, puis Lyon et Paris.

Elle est allée voir si l’herbe du voisin était plus verte et se former au clown en Argentine, avec Lila Monti, Marina Barbers et Gabriel Chamé et en France, les clowns du soir au Samovar. Elle se met en mouvement aux ateliers du Théâtre du mouvement et apprends à devenir manipulatrice : à la formation professionnelle acteur-marionnettiste du Théâtre aux Mains nues et avec Gare Centrale, compagnie belge de Théâtre d’objet.
En 2016 La Maison du Conte de Chevilly-Larue devient aussi sa maison, elle y pose ses valises pour participer à l’Atelier à l’année, mais aussi à l’atelier Raconter aux tout-petits, et enfin, participe du cinquième labo des conteur.euses professionnel.le.s de la maison.

De laborantine à apprentie. Aujourd’hui, elle est à temps-plein fai-ariste. Mais pendant les vacances, elle travaille avec des compagnies, écoles, mairies, associations entre le Brésil et la France. Le mélange des arts et des langues impulse l’ensemble de ses travaux, pour tout public, dès la toute petite enfance.

eau bénite

eau bénite est le Projet Personnel de Création porté par Ana Laura, entre septembre 2022 et juin 2023, dans le cadre de la formation supérieure.
L’interview ci-dessous a été réalisée et retranscrite en juin 2023 par Julie Bordenave.



Quelle tradition du conte revendiques-tu ?
Dans le nord-ouest du Brésil, où je suis née et où j’ai grandi, des maîtres et maîtresses de l’art populaire sont élevé·e·s au rang de patrimoine vivant et transmettent leur savoir-faire au sein de leurs ateliers : ils et elles y présentent leurs « jouets », ainsi qu’on appelle l’ensemble du matériel artistique lié à ces pratiques. Ça se passe souvent chez eux·elles en extérieur, ou dans la rue. En entrant à la FAI-AR je souhaitais davantage expérimenter dans l’espace public mais aussi chercher des outils pour pouvoir rêver plus grand. Et cela m’a permis d’entretenir un dialogue entre cet art populaire venu du Brésil et une école supérieure en Occident !

eau bénite constitue le premier volet d’un projet plus vaste autour de l’eau ?
J’ai en effet entamé une recherche sur l’eau, une matière qui me fascine. Je suis prête à y consacrer les dix prochaines années de ma recherche artistique, en la déclinant autour de différentes saisons : des pleurs, de la pluie, de la saison sèche… Je travaille pour l’instant sur la manière dont les contes se transforment de part et d’autre d’un cours d’eau, en explorant les deux rives à différentes échelles : de la Seine, du Lac Léman, de la Méditerranée ou de l’Atlantique… À la manière d’une immersion dans l’eau bénite, ces contes ressortent modifiés par leur traversée ! Pour rendre cela tangible, je mets en scène cinq artistes qui racontent et connectent les contes entre eux, et au contexte qui les héberge : le cours d’eau à la fois sépare et rapproche, permet le dedans / dehors. L’oralité des contes permet de ne pas s’enfermer dans quelque chose de figé ! J’aime ce pouvoir de la parole qui se passe, rebondit, entre en désaccord, offre une pluralité de points de vue.

Quelle traversée prévois-tu pour le·la spectateur·rice ?
Accueilli à l’entrée d’une piscine, le public est invité à y déambuler. Il sera accompagné de musiques, d’histoires et de mouvements jusque dans l’eau. Les autres usager·ère·s de la piscine peuvent continuer à nager, ou choisir de se joindre à nous. En tant qu’artiste je cherche les endroits que j’ai envie d’occuper avec mon discours, mes envies, mon corps et ceux de mes collaborateurs. J’ai choisi des espaces d’amusement pour faire la paix avec l’eau. La paix de la soif, des naufrages, des bateaux négriers, du manque d’accès à l’eau potable, du manque de politique publique déguisé en racisme scientifique. L’eau comme pur espace d’amusement qui accueille le merveilleux et une équipe noire et afrodescendante.

Présentation vidéo du projet

Interview et captation vidéo réalisées lors des Esquisses, en juin 2023.
Ces Esquisses sont des présentations de maquettes des Projets Personnels de Création menés pendant la formation supérieure de la FAI-AR.