Rêveuse pragmatique

Ari
Hamot

Activité professionnelle : scénographe, comédienne, architecte

Habitat naturel ou semi-naturel : Paris, Nantes, Marseille, de manière général proche de l’eau et du vent

Description [figure de style : name dropping ] :

Architecte diplômée de l’ENSA-V et de scénographie à l’ENSA-Nantes,elle y rencontre le chorégraphe Loïc Touzé, ainsi que les scénographes Raymond Sarty et Chantal Thomas, avec qui elle collabore par la suite. En 2019, elle participe à la quadriennale de scénographie de Prague avec Philippe Quesne et elle apprend à souder à la compagnie La Machine.

Théâtre, danse, espace public, opéra, sa curiosité la motive à traverser ces divers milieux en travaillant avec différentes compagnies dont Ici Même Paris, Walter & Joséphine, le collectif 1.5 dont Gabriel Um, Rouge Delta, TAAT, Du bout des doigts, La Fidèle Idée, InterStices.
Pour elles·eux elle prend soin de la scénographie et parfois même de la construction.

Avec la création de la compagnie Millette et Paillette à laquelle elle prend part, elle met sur l’établi ses capacités de clown, de metteuse en scène et de productrice pour créer des formes en rue, en vélo et en montagne. Elle y déploie alors sa passion pour le jeu théâtral qu’elle développe depuis plusieurs années . Elle emmène ses questionnements sur l’écologie, le féminisme et la désobéissance dans des spectacles; et ses envies de liens humains prennent forme dans des chantiers participatifs.

Dans tous ses projets, elle met un point d’honneur à harmoniser le fond et la forme, pour que son attention au vivant prenne autant corps dans le récit que dans les matériaux qu’elle a entre les mains.

Actualité
Elle commence la FAI-AR, pour continuer à rêver, à muscler ses idées et s’engager pleinement dans et pour l’espace public .

Les mots de la fin
L’utopie ? Mettons-y le cap. Nous y serons à quelques clous de distance!

Mange tes maux 

Mange tes maux est le Projet Personnel de Création porté par Ari, entre septembre 2024 et mai 2025, dans le cadre de la formation supérieure. L’interview ci-dessous a été réalisée et retranscrite en mai 2025 par Julie Bordenave.

Habitée par les pensées décoloniales, et au-delà, leurs liens fondamentaux avec l’écologie du Vivant, Ari Hamot plonge dans les racines de son ascendance pour évoquer le cycle de l’esclavagisme. Avec Mange tes maux, elle décrypte les stigmates de l’histoire – celle qui est tue, taboue, confisquée ou détournée – sur nos destinées, mais aussi sur nos environnements urbains. Mu par une volonté de remettre en partage des faits traumatiques, dont la trace est encore visible dans nos vi(ll)es au quotidien, le projet de création regroupe trois formes évoquant le rapport aux ancêtres. Grinçante, l’analogie avec la nourriture assimile l’héritage généalogique – et “l’exhumation de ces histoires qu’on ne nous a pas racontées” – à une sève qui nous irrigue, un nutriment parfois mal digéré, faisant la lumière sur ce qu’on ingurgite ou rejette. Autonomes ou complémentaires, chacune des trois formes explore un type particulier d’adresse au public, de registre de langues, de format et de temporalité. 

Déambulatoire en cours d’écriture, #BalanceTesAncêtres narre le parcours d’une femme blanche, remontant le fil de son arbre généalogique jusqu’à ses ancêtres esclavagistes ; une quête relevant de l’histoire tant individuelle que collective, mêlant enjeux émotionnels et géopolitiques. Le solo est émaillé d’images saisissantes – plongée dans les égouts, collerette d’aristocrate prenant feu sur un lampadaire… – faisant parler les traces de la douloureuse histoire du colonialisme, insidieusement incrustée dans nos villes : provenance des richesses, architecture, nom des rues… Cette iconographie onirique et explicite entre en écho avec un texte incisif, à l’ironie volontiers tranchante. 

Service postal d’écriture, Correspondance d’outre-tombe propose de s’adresser à un ancêtre, via la rédaction d’une lettre, possiblement rendue publique par un enregistrement vocal, avant la ritualisation d’un envoi collectif par voie aqueuse (mer, fleuve, lac…). A destination d’un public inscrit ou passant, cette forme requiert une présence de 2 à 5 jours, pour une équipe de 5 postiers-postières. 

La plombière de l’histoire tient à la fois de l’installation plastique, du théâtre interactif pour un spectateur et de l’écriture poétique. A l’aise dans le maniement de son “Destop poétique”, la plombière éponyme propose de dénouer un conflit, une honte ou un silence ; de déverrouiller une situation familiale bouchée, via la rédaction d’un texte, à ingurgiter ou diluer dans ses canalisations. Rattachant une histoire personnelle à des enjeux collectifs, cette forme – réclamant un temps de présence au long cours, assorti d’un fort enjeu de médiation – ménage aussi des temps collectifs, avec des outils fédérateurs type frizorama (chronologie participative) pour aboutir au partage de ses textes. 

Quelles dimensions vous intéressent particulièrement dans la création en espace public ?
La relation au réel y est fondamentale, on doit faire avec. C’est passionnant de faire exister des moments de récit dans des lieux traversés par d’autres usages que ceux du spectacle vivant. C’est créer de l’extra-quotidien. Je suis intéressée par la déambulation, un format qui fait parler l’espace, exigeant au niveau des contraintes dramaturgiques et de la gestion du public. Un beau challenge ! J’adore aussi penser des formats artistiques pour un public qui n’a pas rendez-vous, attiser sa curiosité et créer des décalages de réalité. 

De quelle manière votre approche dans ce domaine a-t-elle évolué au cours de la formation ?
J’ai approfondi mon rapport à l’écriture et à la mise en scène, et assouvi mon envie d’être en jeu, de m’outiller, de prendre du recul et de faire de nouvelles rencontres. J’ai expérimenté la manière dont la mise en scène peut considérer la singularité des interprètes et se mettre à leur service. 

Quelles prochaines étapes envisagez-vous pour la suite de votre travail de création ?
Je compte travailler le dispositif scénographique, d’accueil public et de mise en scène de l’envoi collectif pour Correspondance d’outre-tombe (création 2026). Je vais continuer à développer la forme performative (textuelle et corporelles) et chercher une collaboration pour développer l’univers sonore de #BalanceTesAncêtres (création 2027). La plombière de l’histoire, un format plus flexible pouvant s’adapter à différents endroits et réseaux, nécessite un temps long sur le territoire (1 semaine minimum et jusqu’à 4). La création, à laquelle aboutit ce protocole de rencontre et d’écriture, se renouvelle à chaque accueil.

Présentation vidéo du projet

Interview et captation vidéo réalisées lors des Esquisses, en mai 2025.
Ces Esquisses sont des présentations de maquettes des Projets Personnels de Création menés pendant la formation supérieure de la FAI-AR.


Photo projet : ©John Sley Pierre – graphisme : Ari Hamot | Texte projet : ©Julie Bordenave | Vidéo esquisse : ©Smelly Dog Films